« Sans le gilet flottant qui double ma veste de mer, je ne serais plus ici pour raconter mon histoire. Sans lui, j'aurais coulé à pic. Au lieu de ça, la gifle de l'eau glaciale en plein visage m'a dégrisé d'un coup et j'ai basculé sur le dos. Furieux. C'était bien la première fois que je me prenais les pieds dans une amarre au bord d'un quai. Par chance, un réverbère éclairait une échelle, tout près. Quelques brasses laborieuses et, lorsque ma main a croché dans un barreau gluant, j'étais frigorifié mais sauf. Une fois sur le quai, je suis parti au petit trot vers les rampes du cours Dajot. J'ai couru vers mon hôtel de la place de la Tour d'Auvergne en laissant derrière moi un filet d'eau. Quelque chose me disait qu'il valait mieux ne plus me montrer sur le port cette nuit. Car même si un déraisonnable mélange de whisky et de bière avait pu me faire trébucher, je ne doutais pas d'avoir senti dans mon dos une forte poussée qui m'avait proprement catapulté à l'eau. » De passage à Brest pour présenter son dernier livre de mer, le journaliste François-Marie Rolland ne s'attendait pas à être jeté dans les eaux du port par un inconnu, en pleine nuit. Mais dans ce Finistère où il a passé quelques années de sa jeunesse, tout prend soudain une allure de mystère. Les fantômes de son ancienne école de curés bretons resurgissent pour se mêler à la campagne électorale qui agite la ville. Ses anciens camarades de collège sont devenus des ennemis implacables, et les souvenirs de gamins se mêlent aux fracas de l'Histoire pour mieux s'accorder à la brume qui noie le port, aux coups de vent qui balaient la mer d'Iroise et aux lumières folles sur les crêtes des monts d'Arrée. Rattrapé par la houle humaine et océanique, François-Marie ne peut se dérober: il doit faire face au passé et démêler les fils de ces destins croisés.